L’espace est un environnement hostile, c’est un euphémisme. Imaginez : entre l’ombre et la lumière, les écarts thermiques peuvent atteindre 200°C. Dans ces conditions, la régulation de la température intérieure de la Station Spatiale Internationale (ISS) est un défi majeur. De fait, la température dans l’ISS est maintenue entre 21°C et 23°C. Comment une telle prouesse de génie climatique est-elle réalisée par les ingénieurs ? La NASA et Boeing ont inventé une climatisation d’un nouveau genre. Explications.
Tout commence par une isolation hors normes
L’isolation de la station spatiale internationale (ISS) ferait pâlir de jalousie un ours en pleine banquise. L’isolation de l’ISS est constituée d’une couche extérieure appelée MLI (multi-Layer Insulation) d’une efficacité redoutable pour maintenir les astronautes dans un environnement vivable.
En effet, dans l’espace, il n’y a pas d’air comme sur terre pour servir d’isolant naturel. Il n’y a donc pas de phénomène de conduction ou de convection possible. Dès lors, dans l’espace, les objets se réchauffent en absorbant les rayons du soleil et ils refroidissent en émettant des infrarouges. Voilà pourquoi l’isolation de l’ISS est composé de 3 couches de matériaux high-tech.
Ces 3 couches différentes se répartissent ainsi :
- une première enveloppe de mylar joue le rôle de couche de réflexion qui bloque les radiations solaires. Elle est extrêmement mince, soit 0,3 mm
- une deuxième couche de kapton assure la fonction de couche protectrice
- une troisième couche de dacron sert de couche intermédiaire de séparation pour empêcher à la chaleur de se propager de l’une à l’autre.
Ce procédé fonctionne si bien que l’ISS est presque totalement imperméable d’un point de vue énergétique. Dès lors, le problème revient de contrôler la température intérieure de l’ISS. En effet, la station est bourrée de matériel électronique qui dégage de la chaleur continuellement. Les ingénieurs ont donc cherché une façon d’évacuer ce trop plein de chaleur.
Le radiateur le plus perfectionné au monde
Un radiateur – très perfectionné – appelé ACTS (Active Thermal Control System) a été imaginé. Il s’agit d’un échangeur thermique relié à une boucle de refroidissement à l’eau qui circule dans des radiateurs en aluminium de 6 m2 situés à l’extérieur de la station spatiale. Les calories en excès sont capturées puis transportées par la boucle d’eau vers les radiateurs qui dissipent la chaleur dans le vide intersidéral.
Pour éviter que cette eau ne gèle, un second échangeur à base d’ammoniac fait l’interface. En effet, l’ammoniac gèle à -77°C et sa vitesse de circulation l’empêche de geler lorsque l’IS est dans l’ombre de la terre. Ces radiateurs sont contrôlés par un algorithme qui permet de les mettre en position « face au soleil » ou « face à la Terre ».
Ce système de refroidissement est relié à un autre système qui contrôle le flux d’air à l’intérieur de la station spatiale pour une répartition de la chaleur uniforme.
Sans cette climatisation, la température à l’intérieur de l’ISS, explique la Nasa, atteindrait les 120 degrés lorsqu’elle est exposée au Soleil et chuterait à -157 degrés lorsqu’elle est plongée dans l’ombre du Soleil.
Une pompe de 355 Kg remplacée en 2010
Ce système de refroidissement est tombé en panne le 31 juillet 2010 ce qui a obligé les astronautes a effectuer une sortie dans l’espace périlleuse et complexe en vue de réparer le dispositif.
Deux premières sorties, réalisées les 3 et 11 août 2010, ont permis de retirer la pompe défaillante. Le premier essai, qui devait être le seul, avait échoué au terme d’une sortie record de 8 heures, la plus longue jamais réalisée dans l’histoire de l’ISS. Les astronautes ont alors détecté une fuite d’ammoniac qui les a contraint a reporter les opérations pour réévaluer la procédure.
La troisième sortie a permis de remplacer la pompe par un module de rechange de 355 kg.
Des solutions de refroidissement alternatives sont à l’étude
En 1992, la Nasa a travaillé sur un système de réfrigération thermoacoustique qui fut embarqué sur la navette spatiale Discovery. Le principe de ce système de réfrigération révolutionnaire est de convertir l’énergie acoustique en énergie thermique. Autrement dit, il s’agit d’utiliser des ondes sonores pour produire du froid.
Avantages d’un tel système : plus de piston ni de pièces mécaniques à lubrifier, et surtout plus de gaz réfrigérants. Une configuration idéale pour produire du froid dans l’espace.
Le système thermoacoustique fonctionne avec de simples tubes remplis d’helium (un gaz inerte) dans lesquels se propagent des ondes sonores. En effet, le son est bien capable de modifier la température de l’air (une découverte qui date de 1816). Ce système permet de générer une température qui peut descendre jusqu’à -150°C.